TRADITIONS Saints patrons des rues de Mons

 

Sainte Waudru (612 - 686)
Soeur de sainte Aldegonde de Maubeuge, 
toutes deux filles de saint Walbert et sainte Bertille,
 accompagnée de son mari saint Vincent de Soignies, 
et de leurs enfants saint Landry (évêque de Metz), 
saint Dentelin, sainte Adeltrude et sainte Madelberte



SAINTS PATRONS DES RUES DE MONS

Par Léopold Devillers

Extrait des "Annales du Cercle Archéologique de Mons"
Tome II - 1859



Patrons des rues de Mons

Voici la reproduction textuelle d'un document curieux des archives communales de Mons, qui nous a été communiqué par M. l'archiviste Lacroix, et qui porte pour titre :  Liste des saints et saintes et des rues (XVIIème siècle).


Saint Jean. — Rue de Bertaimont, Grande Rue, la Chaussée, Grand-Marché (Grand-Place).

Saint François. — Le Rivage, Béguinage, Cincq Visages, la Grosse-Pomme, Dames Oyseuses (aujourd'hui rue Notre-Dame Débonnaire).

Saint Augustin. — Rue de Hauts-Bois, la ruelle des Loups (la ruelle des Loups est supprimée), le Cul du Sacq, les trois Chasses (la ruelle Rachot, Spira et Montignies), la Guéritte (proche de la maison de Londres).

Saint Ambroise. — Rue d'Havrez, rue Jean Renaux (atcuellement rue de la Biche), Marché au Poisson aujourd'hui marché à la volaille), Coure du Miroire, Rue des Belneux (autrefois rue Rivart).

Saint Sébastien. — Rue des Juifs, Croix Place, rue du nouveau Vers (probablement l'actuelle rue du Cerf-Volant), Trou Oudart, rue des Blancs Mouchons, rue de Dinand (sic).

Saint Antoine. — Petit Marché, rue de la Couronne, rue de la Clée, Grande Triperie (la partie haute de cette rue a pris le nom de rue de la Coupe), Petite Triperie.

Saint Adrien. — Rue de Passages, rue Mont-Escouvet, rue de Grousseliers.

Saint Philippe. — Grande Guerlande, Petite Guerlande, rue de Liége, rue Sans Coron.

Notre-Dame. — Rue Notre-Dame, rue Noble, la Petite Boucherie, rue Samson, rue de Nate.

Saint Roch. — Rue de Nimy, rue de la Tilleries, rue Sans Raison, Cour du Noir Levrier, rue des Fossez.

Saint Pierre. — La place Saint Jean, rue du Grand Cerf, rue de Quatre fils Aimont, rue des Marcottes, rue des Estampes, rue Neuve.

Saint Germain. — Rue du Parcq, rue des Indes, rue des Telliers, rue des Compaignions, rue des Gailliés.

Saint Thomas Dacquain. — Borgne Agasse, Galiarmont, rue des Quiévrois, rue d'Enghien.

Notre-Dame de Douleur. — Rue de Nimy, la chasse du Grand Jour, Trou Boudain, rue de la Tillerie, rue de Gaillier.

Notre-Dame de Bénédiction. — Rue des Haut Bois, la ruelle des Loups, le Cul du Sacq, les trois Chasses, la Guéritte.

Sainte Marguerite. — Rue de Bertaimont, rue des Blancs Mouchons, Grande Rue, la Chaussée, Grand Marché.

Sainte Barbe. — Rue des Passages, Mont Escouvez, rue des Grousseliers, rue Verde.

Sainte Catherine. — La place Saint Jean, rue des Marcottes, rue des Estampes, rue du Blanc Cerf, rue des Quatre fils Aimont.

Sainte Vénérande. —Rue Notre-Dame, rue Samson, rue des Viesiers, rue des Juifs, le Trou Oudart.

Sainte Jeanne. — Rue du Parcq, rue des Indes, rue des Telliers, rue des Compagnons, rue d'Indiens.

Sainte Anne. — Le Rivage, rue Cincq Visages, Béguinage, rue de la Grosse Pomme, rue des Dames Oyseuses, rue de la Potrie, rue des Clercqs.

Sainte Agnesse. — Rue de Nimys, rue Sans Raison, Coure du Noire Levrier, rue des Fossez.

Sainte Waudru. — La Grande Guerlante, Petite Guerlante, rue de Liége, rue Sans Coron, rue de Dinant.

Sainte Elisabeth. — Rue d'Avrez , rue Jean Renaux, Marché au Poisson, Coure (sic) du Miroir, rue des Belneux.

Sainte Marie Magdelaine. — Grande Triperie, Petite Triperie, Petit Marché, rue de la Couronne, rue de la Clef.

On comprend qu'à une époque où tout dans notre ville avait pour centre commun la religion, ses divers quartiers fussent mis sous la protection d'un saint ou d'une sainte.

Aujourd'hui encore, on voit dans les rues de Mons de nombreuses niches contenant des madones.

Nous avons recueilli les noms sous lesquels sont connues celles de ces statues que l'on rencontre encore dans plusieurs de nos rues. Les voici :  Notre-Dame des Sept-Douleurs, 1734 (rue de la Couronne, n° 5); N.-D. de Cambron (rue à Degrés, n° 2); N.-D. de Bon-Vouloir (rue des Fripiers, n° 33, rue Notre-Dame, n° 52); N.-D de Bon-Secours (Grand Béguinage, contre la muraille de l'ancienne cure, rue de la Halle, n° 4, rue Sans Corron, n° 1, rue de Dinant, contre la maison à l'angle de la rue des Capucins, n° 15, rue des Marcottes, entre les maisons n° 5 et 7, rue Notre-Dame, n° 9, rue des Chartriers, n° 19, ruelle des Pécheurs, n° 10, et rue des Gailliers, vis-à-vis de la maison n° 5); N.-D. du Refuge (rue de la Petite-Triperie, n° 21); N.-D. de Bons Conseils (rue des Gades, n° 2); N.-D. de Conservation (rue Cronque, n° 15); N -D. de Mont-Carmel (ruelle Rachot, n° 5); N.-D. de Tongres (rue du Parc, n° 27, rue des Groseillers, n° 42, rue des Blancs-Mouchons, n° 8); N-D. de Grâce (rue de Cantimpret, n° 5, rue des Ursulines, n° 17, rue d'Havré, n° 138); N.-D. Débonnaire ( rue de ce nom, n° 19) ; N-D. des Anges (rue de Gaillardmont, n° 7); N.-D. du Mont-Serrat (rue de Notre-Dame, n° 28, rue des Epingliers, contre la maison n° 37 de la rue du Haut-Bois). On trouve aussi les statues de sainte Anne et de sainte Marguerite dans les rues de Saint-Paul, n° 6, et Derrière-la-Halle, n° 14, respectivement; enfin, celle de Jésus flagellé, au bas de la rue des Compagnons, à l'angle de la maison n° 23.

Durant les octaves de l'Assomption et de la Nativité, ces niches sont décorées et protégées par une tente en toile. Le soir, on allume autour de l'image de la Vierge une profusion de chandelles, et l'on chante dans une chambre voisine les litanies et des hymnes en l'honneur de Marie. L'archevêque de Cambrai voulut abolir cet usage, par une ordonnance du 23 avril 1739; mais il ne put y parvenir. L'ancienne dévotion dont il s'agit, s'est perpétuée jusqu'à présent. C'est, avec les ronds de Saint-Jean et de Saint-Pierre, un dernier souvenir de ces réunions de voisinages ou ruages, qui avaient leurs fêtes et leurs amusements particuliers.

TRADITIONS Vieilles enseignes à Mons

 

Hôtel de ville de Mons vers 1860



VIEILLES ENSEIGNES A MONS

Par Léopold Devillers

Paru dans "Les annales du Cercle Archéologique de Mons"
Tome II - 1859



Vieilles Enseignes, A Mons. — Les enseignes d'autrefois étaient, en quelque sorte, des noms propres donnés aux maisons.

Les dénominations religieuses étaient souvent préférées pour les auberges, destinées spécialement aux pèlerins (hôtelleries de Barbe, au faubourg d'Havré, de l'Ange, rue de la Chaussée, n° 78, de l'Ange Raphaël, rue des Juifs, n° 4, etc.). Les demeures des ecclésiastiques portaient assez généralement des noms de saints Beaucoup de bourgeois s'estimaient également heureux d'habiter une maison sous le patronage d'un saint ou d'une sainte. Les marchands et les artisans prenaient ordinairement pour enseignes, des allégories, des attributs de leur négoce, de leur métier. Les végétaux , les animaux, les astres, les noms de localités, de professions, d'ustensiles, de meubles, de vêtements fournissaient,comme de nos jours, matière à des enseignes. Les sujets fantastiques, les calembours, les bons mots, les allusions excitant tout naturellement l'attention, les marchands ne manquaient pas d'y avoir recours pour le choix d'une enseigne, et cherchaient à acquérir la vogue de cette manière, en dépit du proverbe : A bon vin, pas d'enseigne. Enfin, on emprunta aussi des dénominations historiques; mais elles furent rares à Mons.

Les vieilles enseignes étaient généralement sculptées en pierre dans les façades des maisons. Cependant, il y en avait en bois ou en métal, que l'on pouvait transporter d'un endroit de la ville à l'autre. Ces dernières enseignes n'ayant pas la fixité des premières, il n'y a guère que celles-ci, véritables notabilités du genre, qui aient survécu en partie aux nombreux bouleversements qu'ont amenés les démolitions et surtout les reconstructions des vitrines de bon nombre de maisons de commerce.

Actuellement, on ne trouve dans notre ville que peu d'anciennes enseignes. En revanche, on en fait chaque jour de nouvelles, qui finiront peut-être par avoir la popularité des autres. Voici l'indication de celles d'entre ces dernières qui existent encore:

Au saint nom de Jésus (monogramme JHS, en lettres d'or, sur plaque de tôle, rue d'Enghien, n° 6).
Au château d'Enghien ( inscription en lettres d'or sur une plaque de pierre, dans la façade de la maison n° 5 de cette rue).
A la Grappe de Raisin (ancien estaminet au vin). — (Ornement au balcon, rue des Clercs, n° 2).
Au Blanc Lévrier (sculpture de pierre dans la façade de la maison n° 36 de la Grand'Place).
A la Coupe d'or (ciboire sculpté et doré, sur la façade de la maison n° 17 de la rue de la Coupe).
A saint Antoine (ce saint ermite, gravé sur une pierre de la façade de la maison n° 35 de ladite rue).
Au Lion rouge (sculpture, maison n° 20, ibidem).
A la Jambe de fer (sculpture, ibidem, n° 46).
A la Tète St Jean (sculpture de pierre, rue de la Clef, n° 9).
A la Faulx d'or (enseigne volante, idem, n° 33).
Au grand Laboureur (inscription gravée sur la façade, rue de la Clef, n° 30).
Au Compas d'or (peinture dorée sur bois, rue du Haut-Bois, n° 12).
Au Pistolet d'or (sculpture de pierre, avec la date de 1711, ibidem, n° 35).
A l'Ecaillé d'or (idem, ibidem, n° 24).
Au Cornet d'or (idem , ibidem, n° 64).
A la Paile d'or (idem, rue d'Havré, n° 72).
Aux Quatre Seaux (4 seaux de fer blanc, ibidem, n° 130).
Aux Trois Maillets d'or (sculpture de pierre, dorée, ibidem, n° 129).
Au Mousqueton d'or (idem, ibidem, n° 126).
Au Corbeau (auberge). — (Idem, ibidem, n° 108).
Au Peigne d'argent (idem, ibidem, n° 62).
Aux Lunettes d'or (idem, ibidem, n° 52). 
Au Renard (idem, ibidem, n° 55). 
A la Clef d'or (sculpture dorée, avec le millésime MDCCXIII, ibidem, n° 46).
A la Tête d'or (sculpture dorée, ibidem, n° 15).
A la Tasche d'argent (sculpture représentant un sac à ouvrage, ibidem, n° 50).
A la Balance d'or, 1768 (sculpture, ibidem, n° 58).
Au Miroir d'argent (idem, ibidem, n° 37).
Au Lion d'or ( idem, ibidem, n° 44).
A la Branche d'or (idem, ibidem, n° 126).
A la Couronne impériale (hôtel). — (Grand'Place, n° 24).
Au gros Visage (sculpture de pierre, avec le millésime 1789, rue du Miroir, n° 10).
A la Couple de Bécasses (auberge). — (Enseigne de bois, rue de la Peine-Perdue, n° 16).
Au Jambon de Bois, on loge à pied (auberge). — (Enseigne de bois, rue des Épingliers, n° 12).
Au Pilon d'or (sculpture dorée, rue de Nimy, n° 1).
A la Poire d'or (idem, ibidem, n° 3).
A l'Oranger (idem, ibidem, n° 7).
Au Paradis (inscription en lettres d'or sur la façade, ibidem, n°23).
Au Grand Turc (simple dénomination, ibidem, n° 58). 
Au Trois Herrent (harengs), 1723 (sculpture de pierre, ibidem, n° 75). 
La Clef Rouge(idem, ibidem, n° 98;. 
Aux Trois Verds Chapeaux (idem, ibidem, n° 104). 
Au Singe d'or (singe doré au balcon, ibidem, n° 42). 
Au Petit Saint-Pierre (enseigne volante, peinte, rue de Nimy, n° 91).
Aux Trois Brouettes (sculpture de pierre, dorée, ib., n° 72). 
Le Château de le Marcotte (sic) 1689 (sculpture de pierre, représentant trois belettes, rue des Marcottes, n° 31).
A la Dogres (inscription, avec le millésime 1735, rue du Parc, n° 42).
A la Moriane (sculpture de pierre, peinte, à la façade de la maison n° 12, rue de la Chaussée).
A l'Espérance (simple dénomination, même rue, n° 29).
A Saint Louis, on vend de beaux draps ( inscription en lettres d'or, gravée sur une pierre de la façade, ibidem, n° 37).
A Sainte-Waudru (peinture sur bois, rue des Fripiers, n° 18).
A la ville d'Avesnes (sculpture de pierre, peinte, portant la date 1724, Grand'Rue, n° 70).
Au saint nom de Jésus (monogramme JHS sculpté sur la façade, ibidem, n° 104).
Au Paon d'or (auberge). — (Peinture dorée sur bois, rue de Bertaimont, n° 3'i).
A la ville de Dinant, brasserie. 1743. (Sculpture de pierre, représentant une forteresse, rue de Dinant, n° 30).
Aux Trois Coulons (estaminet). — (Peinture sur bois représentant trois colombes, rue du Béguinage, n° 22).

On remarque encore au-dessus de la maison dite A la Montagne (rue de la Poterie, n° 2), une grande et magnifique rose, sculptée en pierre.

Nous avons aussi vu, placée dans une muraille de la cour de la maison n° 9, rue de Nimy, une ancienne enseigne, qui était celle d'une maison de la rue d'Havre, représentant une ville fortifiée, sculptée en pierre et portant au bas : La V-L De IeruSalem.

Nous citerons pour mémoire les enseignes qui ont disparu depuis quelques années.

Au Fort Touquet, enseigne d'un vieil estaminet, qui était situé au coin de la ruelle de l'Atre et de la rue du Mont-Escouvet (maison portant actuellement le n° 24).
A la Crosse. — (Rue des Clercs, n° 27).
Aux Cinq Vertus (sculpture, rue des Cinq-Visages, n° 3).
A l'Aigle d'or (hôtel). — (Double aigle doré au balcon, Grand'Place, n° 4).
Au Durmené (estaminet). — (Grand'Place, n° 8).
Au Dragon ( sculpture de pierre peinte, rue de Nimy, n° 62).
A la Chaîne d'or (ibidem, n° 90).
Au Saumon (auberge). — (Ibidem, n° 43).
A l'Etoile Rouge (ibidem, maison incorporée dans celle portant le n° 43).
Au Dauphin (auberge). — (Ibidem, n° 65).
A l'Ours (auberge). — (Sculpture de pierre peinte, portant le millésime 1766, rue du Parc, n° 17).
A la Femme Sauvage (auberge). — (Rue du Parc, n° 8).
Au Rosier (estaminet). — (Rue Cronque, n° 3).
Au Patacon (rue de la Clef, n° 16).
Au Chapeau Blanc (ibidem, n° 1 ).
Au Faisan (auberge). — (Rue de la Halle, n° 4).
Aux Trois Boraines (rue de la Chaussée, n° 25).
Au duc de Lorraine ( peinture sur bois, rue des Fripiers, n° 7 ).
Au Haume (sculpture de pierre, Grand'Rue, n° 52).
A la Petite Nef ( ibidem, n° 63).
A la Licorne (auberge). — (Rue de Bertaimont, n° 31 ).

Enfin, nous donnerons les noms d'anciennes enseignes disparues depuis longtemps, ou qui, pour un bon nombre, se trouvent cachées, soit derrière des boiseries modernes, soit sous le plâtre, et dont l'emplacement ne nous est pas bien connu. Nous les avons rangées suivant les rues où elles se trouvent mentionnées dans certains documents anciens.

Grand'Place. — A la Roue d'or, Au Château d'or, Au Fusil d'or, A la Toison d'or, Au Mortier d'or, A la Croix d'argent, Aux Vieux Amis, A l'Ane barré, Au Prince d'Arenberg, Au Dauphin d'argent, A l'Homme d'arme, Au Lion Verd, A l'Impératrice, Au Cerf.

Rue de Nimy. — A la Chaîne d'argent, Au Joli Cœur, Au prince d'Orange, Au Lévrier Noir, Au Petit Bruxelles, Au Petit Anvers, A la Rose, Au Mont Parnasse, Au Turc, A la Chasse Royale, Au Postillon, Au Cheval blanc, Au Gros Chapelet, Au prince de Condé, Au Grand Boulevard, Au Grand St Pierre, A St Pierre, A la Pomme de Grenade, Aux quatre fils Aymon (à l'angle de la rue de ce nom), Aux Trois Amis, Au Noir Tasseau, Au Grand Paradis, Au Petit Paradis, Au Cardinal, A la maison à Boulle, Aux Trois Rois, Au Petit Milan, Au Nom de Jésus, Au Prince Cardinal, A Ste Christine, A St Jean-Décollé, A Ste Anne, A St Jacques, A St Augustin, Au Flacon d'or.

Rue du Miroir. — Au Puits d'argent, Au Dauphin d Or, Au nom de Jésus, A l'Aigle d'or, A la Pucelle d'Orléans, Au Grand Miroir, Au Petit Miroir.

Marché au Poisson (aujourd'hui à la Volaille). — Au Noyau d'or. 

Rue de la Raquette. — A la Raquette d'argent. 

Rue des Fossés. — A l'Ecole. 

Rue Neuve. — A la Cantine. (Cette maison a été incorporée au théâtre.) 

Rue Verte. — A l'Ancre d'or. 

Rue Sans-Raison. — A Bernabas.

Rue des Passages. — A St Pierre.

Rue du Mont-Escouvet. — Au Mont St Adrien.

Rue des Groseillers. — Au Chapeau rouge, A la Tour Blanche.

Rue de la Biche. — A la Biche.

Rue d'Havré — Au Chasseur royal, Au Perroquet couronné, A St Martin , A l'Empereur, A St Nicolas , A l'Hôtellerie , Aux Paternottes, A Ste Thérèse, Au Prince de Roche, Au Dur Mené, A la Truye qui file, A l'Estocade, A l'Épée d'arme, Au Soleil, Au St Esprit, A St Antoine, Aux Trois Couronnes, Au Pot d'étain, A l'Aigle Rouge, Au Vit Cocq, Au Chapeau d'argent, Au Coq chantant, Au Moulinet, A la Bourse vide, Au Chapeau de fer, A la Catoire d'argent, Au Veau d'Or, Au Chaudron d'or. Au Puits d'or, A la Faux d'or, Au Pourcelet d'or, A la Bourse d'or, A la Haise d'or, Au Bourlet d'or, A la Croix d'or, A la Plume d'or, Au Canon d'or, A la Potence d'or, Au Moulin d'or, A l'Aulne d'or.

Rue de la Clef. — Au Peigne d'Or, A la Lunette d'Or, Au Citron d'Or, Au Cornet d'or, A la Clef, A la Chasuble, Aux Sept Frères, A St Adrien, Au Heaume, A la Botte Romaine, Aux Trois Couronnes , A St Jean-Baptiste, A l'Ecu d'argent, Au Petit Laboureur, A la Sculture ferée, A la Sirène de mer, Au Double Ducat, A St George.

Cul du Sac. — A St Georges, A St Martin, Au Cheval blanc, Au Bocquet d'or.

Rue St Paul. — A la Bergère.

Rues du Haut-Bois et de la Halle. — Au Chat, A l'Empereur, Au Loup, Au Petit Loup, Au Vieux Loup, Au Soleil d'or, A la Ville de Huy, Au Chaud Caillou, A St Denis, au Lièvre courant, A Ste Barbe, Au Chapon de Bruges, A la Brique jaune, A la Bonne Espérance, Au Grand Faisan, A l'Écu rouge, A la Doloire (outil de tonnelier).

Rue de la Peine-Perdue. — A la Peine perdue: enseigne qui représentait un barbier savonnant un nègre et s'efforçant de le blanchir.

Marché au Compenaye (aujourd'hui Petit Marché). — Au Grand Chat, A la Reine d'Espagne, Aux trois Étoiles, Au Tambour Royal, Aux deux Chais, Aux trois Ciseaux, Au Coq chantant, Au Coquelet, Au Verd Maillet, Aux trois Carabines, A la Tour Jolie.

Rue de la Coupe. — Au Cardinal, Au Comte de Bucquoy, Au Pélican, A la Grande Écritoire, A la Fontaine d'or, Au Timbal royal, A la ville de Rome, A St Dominique.

Rue de la Couronne. — Au Colombier, Au Dragon d'Argent, Au Mouton blanc.

Rue de lu Grande Triperie. — A la Rouge Cravatte, Au Balcon, A l'Aigle noir.

Rue de la Petite Triperie. — Au Refuge de Bélian, A la Brique jaune, A l'Éléphant.

Rue des Fripiers. — Au Dromadaire, Au Figuier.

Rue de Notre-Dame. — Au Petit Namur, Aux trois Borins, Au Chapeau d'or, Au Rouge Cœur, A la Bouteille d'or, Aux trois Moulins, Au trois Chats, Au Fer de Charrue, Au Gril d'or, Au Petit Maubeuge , Au Perroquet vert.

Croix-Place. — A la Corne de bœuf.

Rue des Juifs. — Au gras Bœuf, Au Mouton noir, A la Bonne Moutarde, Au Lettrier.

Rue de Bertaimont. — Aux trois Gobelets, Au Blan Gant, A la Moule d'or, Au Mouton rouge, A St Pierre, A la Croix Rouge, Au Violon d'or. — Au Tour à la Mode, guinguette hors la porte de Bertaimont.
Trou Oudart. — Au Cœur sur l'eau.

Grand'Rue. — Au Laurier, Au Porc d'or, A St Claude, A l'Écu d'Artois, A la Charrue d'or, Au Cerf, A la Cuve d'or, A la Botte d'or, A la Tortue d'or, A la Noire Teste, Au Pied blanc, Au Point d'or, A la Garde de Dieu, A N.-D. de Fineterre, A la Tête de Bœuf, A Namur, A la Petite Cuve d'or, Au Cerf rouge, Aux trois Couronnes.

Rue de la Guirlande. — Au Cœur Joyeux, A la Dame de Compagnie, Au Hostier d'or, A St Christophe, A l'Épée d'arme, Au Damier, A la Victoire, A la Ville de St-Ghislain.

Rue des Orphelins. — A St Arnould.

Rue de Liége. — Au Verd Bocquet, Curie Ste Anne.

Rue du Cerf Volant. — A St Louis.

Rue des Blancs Mouchons. — Au Pont de pierre.

Rue de Cantimpret. — Aux trois Boulets, A Ste Marguerite, Au Boulduc.

Béguinage. — A la Paix de Cœur.

Rivage. — A la Tête d'or, A la Ville de Dunkerque, A la Bail d'or, A l'Horloge d'or, Au Dragon rouge, Au Cœur Joyeux, A la Verde Saulx, A S' Antoine, A la Nef d'or, Au Cat (chat) Barré.

RueSamson. — Au Sagittaire.

Rue de la Chaussée. — A l'Étoile d'or, A la Pomme d'or, A la Pouille d'or, A l'Arbre d'or, Au Balon d'or, A la Catoir d'Or, Au Grand Arbre d'or, Au Plat d'or, A l'Escaffiotte d'or, Au Pèlerin, A la Vigne blanche, A l'Alliance, Au Griffon, Aux trois Perdrix, Au Cornet rouge, A t' Pierre, A l'Étoile d'argent, A la Ville de Francfort, Au Prince, Au Cheval volant, A l'Ecu blanc, Au Papegay verd, Au Petit Paris, Au Chapeau Noir, Au Grand Ange, au Petit Ange, Aux deux Visages, A la Reine de France, Au Lion blanc.

Rue de la Poterie. — Au Figuier.

Rue des Clercs. — Au comte de Monteré (de Montrey, général espagnol), A la comtesse Masting, A la ville de Batavia, Au Grand St Laurent, A St François Xavier.

Rue d'Enghien. — A St Hubert, Au Cordon d'or, Au Soulier d'or, A St Druon, Au Bœuf, A la Trompette d'argent.

Rue des Telliers. — A l'Arbre secq.

Rue des Quiévroix. — A la Pie Borgne, A la Borgne Agasse, Au Gros Caillou, Au Dieu des Indes.

Rue des Etampes. — Au Mouton d'or.

Rue des Marcottes. — Au Croissant d'or, Au Pèlerin.

Place St Jean. — Au Cocq d'Inde, Au Verd Galant, A l'Archiduc Joseph, Au Bois de Mons, A St Eloy, A S' Joseph, A la Demi-Lune, Aux Trois Pattes, À la Rose d'Amour.

Rue du Parc. — Au Chien Rouge, A la Porte dorée, Au Petit Breda, Au Chasseur, Au Cheval Rohan, A Nostre-Dame du Rosaire, Au Moulin à Cheval, Au Lièvre blanc, A la Bonne Femme, A la Clef d'or, A St François ( auberge ).

Nous rapporterons ici une inscription gravée sur une pierre posée entre les maisons n° 4 et 6 de la rue des Dominicains: 

16 IHS MA 1l 
Anna . Ioseph . A Peste . Fame 
Et Bello . Libera . Nos . Dne .


TEMPLIERS Willem van Bonem et la Bataille des Eperons d'Or

 

Bataille de Courtrai, dite Bataille des Eperons d'Or
Armée des Flamands et leurs alliés de l'Ordre du Temple (Illustration)


WILLEM VAN BONEM 

ET 

LA BATAILLE DES ÉPERONS D'OR


ou

La fin annoncée de l'Ordre du Temple ?


(En annexe, un article de Johan Ballegeer sur le chevalier templier Willem van Bonem)


Willem van Bonem, ou Guillaume de Bonem, s'inscrit dans la légende - ou tout simplement l'histoire - de l'Ordre du Temple avec un panache certain, mais, contrairement à son "frère" Gérard de Villers, souvent cité dans l'histoire du Temple en Belgique, il reste encore relativement méconnu...

Son nom a donné lieu à de nombreuses interprétations orthographiques, à travers le temps et les auteurs divers :  Boenem, Boonem, Boneem, Bonheem, Bornem, Bornhem... Je me rallierai à la graphie la plus courante, Bonem, que l'on retrouve à Damme, au nord-est de Bruges, où se trouvait, au XIIIème siècle, une seigneurie indépendante appartenant aux Bonem, incluse dans le Franc de Bruges, et dont il subsiste encore de nos jours la Ferme Bonem, au n° 1 de la Bonemstraat (les terres de cette seigneurie furent vendues en 1297 à Baudouin de Dudzele; après être repassé en 1725 aux mains de Ferdinand-Philippe, baron de Boonem d'Everencourt, entre autres tractations, ce bien est actuellement propriété privée).

Le chevalier Guillaume de Bonem, échevin du Franc de Bruges, capitaine du Zwin, seigneur d'Oostkerke, appartint donc à l'Ordre du Temple, et participa, entouré de ses troupes templières, à la Bataille des Eperons d'Or, en 1302, sous la bannière au Lion, bataille qui se termina par la cuisante défaite du roi de France Philippe le Bel face aux rebelles du comté de Flandre.

Un bref  "recadrage historique" serait sans doute utile  :

L'Ordre du Temple, créé le 23 janvier 1120 par un chevalier champenois, Hugues de Payns, ainsi que par le chevalier flamand Geoffroy (ou Godefroy) de Saint-Omer, et confirmé le 13 janvier 1129 au concile de Troyes, a pour vocation première de protéger les routes de pèlerinage vers Jérusalem et d'assurer le transport des reliques chrétiennes. La perte de la Terre Sainte obligera les moines-chevaliers de l'Ordre du Temple à se replier sur leurs bases occidentales, qu'ils ont d'ailleurs fortement développées dès la création de l'Ordre, en France et dans les pays avoisinants, mais notamment dans le comté de Flandre.




J'ai évoqué une "vocation première", mais il faut constater que très vite les Templiers, animés d'un esprit de justice et d'équité peu courant à ces époques, en assument une seconde :  le bien du peuple, face à une féodalité oppressante, face à des "seigneurs" nés tels par chance et qui, sortant trop souvent de leur rôle naturel de protecteurs, deviennent les tyrans que l'on sait. Ainsi, les terres templières deviennent quasiment des lieux de refuge, pour une population autrefois servile, qu'ils libèreront; ils créent des associations d'artisans, libres, qui bâtiront des églises et cathédrales grandioses, car ils sont au service de Dieu et de la Chrétienté (les Templiers obéissent à la Règle rédigée pour eux par Bernard de Clairvaux, qui deviendra en quelque sorte leur "mentor spirituel"); ils animeront le commerce, grâce à des ressources financières importantes, et par un système bancaire fort en avance sur son temps. 

En 1307, le roi de France Philippe IV, dit Philippe le Bel, par exemplaire félonie et avec la relative complicité du pape Clément V (ou plutôt par sa "molle résistance" aux actes du roi de France... A noter aussi que, selon le Parchemin de Chinon de 1308, il semblerait bien que le pape ait "absous les Templiers de tous péchés"...), Philippe le Bel donc met un terme à l'aventure templière. Le procès des Templiers, leurs aveux souvent arrachés sous la torture, les accusations d'infamies soutenues par une propagande préalable orchestrée par Philippe le Bel, la mort sur le bûcher du dernier grand maître de l'Ordre, Jacques de Molay, tout cela hante encore l'imaginaire de beaucoup de nos contemporains.



Philippe le Bel
Gisant de marbre - Abbaye de Saint-Denis



Ce qui est moins clair de nos jours, c'est le "pourquoi" de cette élimination de l'Ordre du Temple.

On a dit, pour les défendre ou pour les charger - car aujourd'hui encore comme depuis des siècles, des historiens s'opposent sur le sens à donner à l'histoire du Temple -, que les Templiers étaient des hérétiques; qu'ils adoraient des divinités païennes, voire le diable en personne;  qu'ils pratiquaient une sorte d'alchimie sorcière afin de remplir leurs coffres d'or; qu'ils étaient homosexuels; etc. Ou que leur destruction aurait constitué pour Philippe le Bel une opportunité de rétablir ses propres finances, fort délabrées, en prenant possession des biens du Temple. Ou encore qu'ils constituaient "un état dans l'état", devenu dangereux à la fois pour le pouvoir du roi de France et celui des seigneurs féodaux...

Dire que les Templiers ont été toujours et partout irréprochables serait la manifestation d'une certaine naïveté. Mais entre la légende et les acccusations, où se déterminer ?

Pour ma part, je n'entrerai pas ici dans ce long débat, qui a déjà été mené souvent avec plus ou moins de bonheur par de nombreux historiens. Je m'arrêterai à un évènement précis, qui semble démontrer qu'à la fin de sa vie, l'Ordre du Temple répondait toujours aux "critères de qualité" voulus par Hugues de Payns, Geoffroy de Saint-Omer et Bernard de Clairvaux.

Il s'agit de la bataille des Eperons d'Or...

Cet évènement, d'autre part, pourrait fort bien expliquer - au-delà de toutes les littératures plus ou moins fantastiques que l'on a commises à ce sujet - la profonde animosité de Philippe le Bel à l'encontre des Templiers, qui s'assouvira en 1307 par la destruction de l'Ordre. Parce que, par cet évènement, les Templiers entrent en conflit armé avec Philippe le Bel !

Les historiens belges ont généralement reconnu une très positive influence templière dans les anciens duché de Brabant, comté de Flandre, et autre Pays de Liège, etc.

Cet extrait d’un article de A. Perreau intitulé « Recherches sur les Templiers belges », paru dans les « Annales de l'Académie d'Archéologie de Belgique » (Tome onzième - 1852), nous donne un aperçu de cette reconnaissance :

"Les Templiers en Belgique se rendirent dignes du reste de l'intérêt que leur témoignèrent les souverains de ce pays par le concours actif qu'ils prêtèrent en toutes circonstances à la défense de la patrie. C'est surtout lors de la guerre acharnée que le roi de France, Philippe-le-Bel, fit aux Flamands dans les premières années du XIVe siècle, que leur patriotisme parut au grand jour. Les historiens de la Flandre n'ont pas oublié de signaler dans leurs écrits la brillante conduite du Templier Guillaume de Bornem, dont la coopération fut si utile aux princes flamands et à Guillaume de Juliers pour organiser l'armée flamande et chasser de la Flandre les troupes françaises qui jusqu'alors n'avaient rencontré aucune résistance sérieuse."

Cet extrait nous signale l'impact templier en Belgique, et surtout, annonce mon propos :   cette fameuse bataille des Eperons d'Or.

Chez les historiens français, on la nomme "Bataille de Courtrai". Et chez les Flamands, elle est connue sous le nom de "Guldensporenslag". Elle a lieu le 11 juillet 1302.

Vers cette époque, le comté de Flandre (c'est-à-dire la Flandre française, de Lille à Dunkerque, soit l'actuelle moitié nord-ouest du département du Nord; les actuelles provinces belges de Flandre orientale et occidentale; une partie de l'actuelle province belge du Hainaut avec Tournai et Mouscron; le sud de l'actuelle Zélande hollandaise avec Aardenburg, Sluis et Hulst), fief du roi de France, s'est fortement développé et enrichi, pour deux raisons :  1° le 4 octobre 1134, un raz-de-marée ouvre une large brèche dans la terre de Flandre, qui fait tout à coup de Bruges un port maritime, lequel devient rapidement l'un des ports commerciaux les plus importants du monde d'alors, ainsi que son avant-port à Damme (la mer est redescendue depuis, et il ne reste plus de cette brèche que le Zwin, charmant endroit entre Knokke et Cadzand)... et 2° le commerce très prospère de la laine avec l'Angleterre.

Ces riches Flamands sont pour Philippe le Bel une opportunité. Ses caisses sont vides. Il veut les remplir avec l'or flamand. Il impose donc des taxes écrasantes. Les Flamands refusent. Philippe le Bel lance ses armées sur la Flandre, armées qui, portant haut des "balais", symbole de leur détermination, "nettoient", c'est-à-dire ravagent le pays. Mais la résistance flamande s'organise. En mai 1302, les Brugeois, commandés par l'un des chefs de cette résistance, Jan Breydel, s'emparent de la garnison française stationnée au château de Male; Guillaume de Bonem participe à l'assaut de la place forte. Quelques jours plus tard, une autre réaction flamande, fort cruelle hélas, purge la ville de Bruges d'une majorité de ses résidents français :  cet épisode sera nommé "les matines brugeoises" (18 mai 1302).

Intermède... Partisans et factions durant la guerre franco-flamande sous Philippe le Bel

Au cours de la guerre qui a opposé le roi de France, Philippe le Bel, aux villes flamandes de Bruges, Gand et au comté de Flandre à la fin du XIIIe et au début du XIVe siècle, la population et les forces politiques flamandes se sont divisées en deux factions principales : les Klauwaards et les Leliaards.

Les Klauwaards, également connus sous le nom de Liebaards, étaient les partisans du comte de Flandre, Gui de Dampierre. Leur nom, signifiant "hommes de la griffe" en néerlandais, faisait référence au lion rampant, symbole du comté de Flandre, qui figure sur leur blason. Cette faction était principalement composée de la petite bourgeoisie, des artisans et des membres des métiers qui luttaient pour l'indépendance de la Flandre face à l'autorité du roi de France. Ils s'opposaient à la politique de centralisation de Philippe le Bel et à l'influence française croissante dans les affaires flamandes.

À l'opposé, les Leliaards étaient les partisans du roi de France. Leur nom est dérivé du mot néerlandais "lelie", qui signifie "lys", en référence à la fleur de lys, emblème de la monarchie française. Cette faction regroupait principalement la haute bourgeoisie, de riches marchands et une partie de la noblesse qui voyaient leur intérêt économique et politique dans une alliance avec la couronne française. Ils soutenaient les tentatives de Philippe le Bel d'intégrer plus fermement le comté de Flandre au royaume de France.

Ces divisions internes ont joué un rôle crucial dans le déroulement du conflit, exacerbant les tensions et menant à des épisodes violents au sein même des villes flamandes, comme les Mâtines brugeoises en 1302, où les Klauwaards se sont soulevés contre les Leliaards et la garnison française.


Rendu fou de rage par ces attaques menées contre des personnes et biens français, Philippe le Bel lève l'une des armées les plus considérables de ce temps. Pour mater ces Flamands qui veulent préserver leurs libertés et leur or, il réunit la fine fleur de la chevalerie française, les "tanks" de l'époque, sept mille hommes bardés de fer. Il fait appel à des mercenaires provençaux, navarrais, espagnols, lombards, qui grossissent les rangs des hommes de troupe et sergents d'armes français. Bref, il constitue une "force de frappe" de près de cinquante mille hommes.

Face à eux... peu de chose. Les milices flamandes, de Bruges, de Gand, et de toutes les régions de Flandre que l'on réunit alors, ne feront pas le poids. C'est alors qu'interviennent les Templiers. Ils décident de prendre fait et cause pour les Flamands, face au roi de France. Sous le commandement de Guillaume de Bonem, ils organisent en hâte la petite armée flamande. Ils élaborent une stratégie, imaginent de reprendre la tactique d'Hannibal à la bataille de Cannes en 216 avant notre ère (laisser volontairement enfoncer le centre des forces pour, après la ruée désordonnée de l'ennemi, les prendre en tenailles avec les ailes gauche et droite), et, dit-on, procurent à la troupe une arme qui aurait été apportée d'Orient par les Templiers, le "goedendag" :   une boule de bois hérissée de pointes de fer, reliée à un bâton de bois par une chaîne, arme d'une efficacité redoutable.

Une autre figure légendaire mais aussi historique de Flandre, Willem van Saeftinghe, moine de l'abbaye de Ter Doest près de Lissewege, "fignole" le dispositif :  sur la trajectoire de la "ruée au centre" que l'on espère de l'ennemi, on aura creusé des fossés, recouverts ensuite de branchages. Les chevaliers français n'y verront que du feu, et se feront prendre au piège.

Très vite, la rébellion flamande fait tache d'huile.  Par jeux d'alliance et parce qu'elles aussi sont soumises aux exactions françaises, d'autres régions de la Belgique d'alors se mobilisent. Les maigres troupes flamandes sont ainsi renforcées par des contingents de Zélande, du Hainaut, du Namurois, du duché de Brabant, du Pays de Liège. Il paraîtrait même - mais cela reste incertain - que des troupes anglaises aient traversé la Manche pour porter secours aux insurgés flamands. Dans cette armée hétéroclite, on voit des nobles, des bourgeois, des paysans, des manants, tout un peuple...

En définitive, les rebelles flamands et leurs alliés réunissent quelque vingt mille hommes.

Le 11 juillet 1302, la bataille s'engage, dans la plaine de Groeninghe, près de Courtrai, aux abords de la Lys.


Bataille des Éperons d'Or ou Bataille de Courtrai
Enluminure extraite des Chroniques de France (fin XIVe siècle)


Chez les Français, il n'y a nulle inquiétude. Sous le commandement de Robert II d'Artois et de Raoul de Nesle, l'armée du roi de France est sûre de son fait.



Armoiries de Robert II d'Artois


Mais c'est compter sans cette association particulière de l'esprit templier et du courage flamand :  bien qu'on l'eût prévenu qu'il valait mieux contourner l'armée flamande et la prendre à revers, Robert d'Artois décide... de foncer dans le piège tendu par les coalisés. Il attaque le centre du dispositif adverse, n'y voyant qu'une troupe de manants peu armés... illusion qu'Hannibal, à la bataille de Cannes, avait déjà réussi à imposer aux légions romaines de Varron et de Paul Emile.

Les chevaliers français, en armure et superbement entraînés au combat, après avoir cru refouler les manants flamands - qui se repliaient volontairement, comme le firent les mercenaires gaulois d'Hannibal, et non pas pris de panique comme l'ont écrit plusieurs historiens ! -, les chevaliers français donc, en une "poussée victorieuse" qui vire vite au désordre, s'embourbent dans les fossés marécageux qu'ils n'avaient point vus... Et là, les ailes gauche et droite de l'armée flamande, commandées par Guy de Namur et Guillaume de Juliers, se rabattent sur eux, les prennent en tenailles, et les massacrent. La chevalerie française est anéantie dans le bloed meersch, le "marais sanglant".



La Bataille des Eperons d'Or
Gravure flamande du XIVème siècle


Guillaume de Bonem et ses Templiers sont de la partie, leur bannière unie à la bannière au lion des Flamands. On les surnomme "les Chevaliers du Cygne". Ils sont constitués de trois groupes :  templiers noirs, templiers gris et templiers blancs, selon leur grade dans l'Ordre. Au milieu d'eux se trouve Willem van Saeftinghe.




La bannière au lion
D'or, au lion de sable, armé et lampassé de gueules



Quelques temps avant la bataille, Philippe le Bel avait demandé aux Templiers français de se joindre à ses troupes... Ils refuseront, arguant qu'il leur était impensable de se battre contre leurs frères belges. Nouvel affront au pouvoir du roi.

La légende, ou l'histoire, affirme que Robert d'Artois fut tué par Willem van Saeftinghe, qui par ailleurs aurait tué quarante chevaliers français à lui seul. Que cela soit vrai ou faux, il n'en demeure pas moins que cette légende, ou vérité historique, reflète fort bien la réalité du moment :  les rebelles flamands et leurs alliés firent un carnage total. Il n'y eut point de quartier.


Statue de Willem van Saeftinghe à Lissewege


Après la bataille, les Flamands arrachèrent des bottes françaises leurs éperons, près de sept cents. Ceux-ci, en or paraît-il, furent exposés dans l'église de Notre-Dame à Courtrai. Quelques années plus tard - et les Templiers n'étaient plus là pour leur venir en aide -, les milices flamandes subirent de graves revers, et la France récupéra ses "éperons d'or", qu'elle transféra dans une église à Dijon.

En 1313, Philippe le Bel, dit "le roi de fer", après les avoir supprimés, s'octroya les richesses monétaires des Templiers et transféra leurs commanderies à l'Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem (appelé plus tard Ordre de Malte). Il mourut l'année suivante, suite, dit-on, à la malédiction que lui lança Jacques de Molay du haut de son bûcher, sur l'Ile aux Juifs à Paris... légende sans doute, mais le "roi de fer" ne survécut donc pas à ses adversaires.

On ne sait trop ce qu'il advint de Guillaume de Bonem. On sait cependant que ses descendants continuèrent en plusieurs occasions d'occuper des charges communales à Bruges.

Les Templiers de Belgique ne furent pas grandement inquiétés après la dissolution de leur ordre, contrairement à leurs frères français.

La majorité d'entre eux néanmoins prirent la fuite, et rejoignirent principalement leurs commanderies du Portugal, où, sous la protection du roi Dom Dinis, ils changèrent de nom et devinrent l'Ordre des Chevaliers du Christ, ou Ordre du Christ.




Croix de l'Ordre du Christ


D'autres choisirent l'Ecosse comme terre d'exil. Ils y seront protégés par Robert Ier d'Ecosse (Robert the Bruce) qui, excommunié, n'avait plus à répondre aux ordres de saisie des biens templiers promulgués par Rome. Une tradition, toujours controversée, affirme que les Templiers ont aidé Robert Ier à gagner la bataille de Bannockburn en juillet 1314, victoire qui assura l'indépendance de l'Ecosse jusqu'en 1707. En récompense de leurs services, Robert Ier aurait constitué ou reconstitué en leur faveur l'Ordre de Saint-André du Chardon, dont les Templiers formeront le noyau. Cet Ordre du Chardon se serait alors installé à Aberdeen puis à Kilwinning... où fut, historiquement cette fois, créée la première loge maçonnique d'Ecosse, vers 1599... ce qui a incité bon nombre d'auteurs à imaginer (?) une filiation entre l'Ordre du Temple et la Franc-Maçonnerie. Vraie ou fausse, c'est cette tradition qu'utilisa en partie Dan Brown dans son très romancé "Da Vinci Code".

En Flandre, les Templiers n'ont pas été oubliés. Plusieurs communes de la région de Slijpe, où se trouvait l'une des commanderies templières les plus importantes de Flandre, ont gardé la croix du Temple dans leur blason (voir à ce sujet mon article "Les armoiries templières de quelques communes de Flandre").

Les Templiers continuent, de nos jours, comme depuis toujours d'ailleurs, à embraser les imaginations. Divers mouvements néo-templiers se sont formés. L'un des plus connus est sans doute, au XVIIIème siècle,  la Stricte Observance Templière, système de hauts-grades souché sur la Franc-Maçonnerie des grades bleus en Allemagne. Jean-Baptiste Willermoz, un franc-maçon lyonnais, rallia la S.O.T. aux loges créées par Martinès de Pasqually en France, et créa ainsi le Rite Ecossais Rectifié - l'un des nombreux rites maçonniques actuels -, qui perpétue l'esprit de l'Ordre du Temple (l'un des grades les plus élevés de ce rite est le "Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte", ou CBCS, manière quelque peu détournée de dire "Chevalier du Temple").




Logo d'une loge maçonnique française
travaillant au Rite Ecossais Rectifié
(R.°. L.°. Kreisteiz à l'Orient de Lorient)




Logo du Grand Prieuré de Nouvelle France,
obédience maçonnique canadienne 
travaillant au Rite Ecossais Rectifié



On connait aussi "l'ordre du temple" de Fabré-Pelaprat, au début du XIXème siècle, séquence relativement bizarre des avatars templiers. Actuellement, de nombreuses confréries se réclament de l'esprit templier :  leurs actes relèvent parfois d'un certain folklore, mais il n'y a sans doute pas lieu de douter de la force de leurs convictions. Il existe aussi toujours des escrocs en cape blanche à croix rouge, dont il convient évidemment de se méfier.

L'esprit templier perdurera donc... si deus lo vult.


Charles Saint-André



Bannière templière
Le Beaucéant


ANNEXE


Willem van Bonem - les Templiers - la Bataille des Éperons d'Or


Données biographiques et chronologiques, ainsi que notes personnelles au sujet de Willem van Bonem, rassemblées par Johan Ballegeer, historien flamand né à Lissewege le 9 mars 1927 et y décédé le 1er janvier 2006.

Les sources de cette enquête figurent en fin d'article;

...

En 1886, on a placé sur la Grand-Place de Bruges la statue de Breydel et de Coninck, principalement sous l'impulsion du Willemsfonds. Il est évident qu'un siècle plus tard, cela devait être célébré. Nous sommes Flamands, après tout. Mon éditeur (Altiora, Averbode) ainsi que la commission Breydel 1986 ont estimé que j'étais l'homme de la situation, etc. Les éditeurs et les commissions sont très forts pour la répartition des tâches.

J'allais donc écrire un livre... La première chose que l'on fait en tant qu'auteur qui n'y connaît rien, c'est de lire un livre sur le sujet. Presque immédiatement, j'ai été confronté à l'action, non ! pas de Breydel et de Coninck, mais d'un certain Willem van Boenhem, Boinem, Bornhem, Boonheim... Et... il s'est avéré qu'il avait été amman d'Oostkerke. Comme je suis plutôt paresseux de nature, je me suis tourné vers notre Président.

S'il connaissait Willem van Bonem ? Il m'a renvoyé à l'article « Oostkerke Ambacht en het Ammanschap van Oostkerke » dans Rond de Poldertorens, XXVI, p. 113-123.

Ce qui a immédiatement frappé, c'est que nous savions « quelque chose » sur Willem van Bonem, que la plupart des auteurs s'obstinent à orthographier Boenhem. Qui sait « quelque chose » sait qu'il sait peu. J'ai donc poursuivi mes recherches.

Je ne cherchais pas seulement des informations sur Willem van Bonem, mais aussi sur les dates et les éléments concernant d'autres chefs de la guerre de 1297-1302, à savoir Breydel, de Coninck, Jan van Renesse, Pieter Uutenzacke, Willem van Saeftinghe et Gui de Namur.

On met alors soigneusement ces données sur des fiches et il m'a semblé une bonne idée de trier celles concernant le si peu connu (trop peu connu) Willem van Bonem et de les présenter ici, bien rangées par ordre chronologique. Ce n'est donc pas un article sur Willem van Bonem. C'est seulement un collage de données. Un auteur doit ensuite colorier de telles données, et nos lecteurs ont bien assez d'imagination pour cela.

Les voici donc (ces données !) :

1288

« ... Comme contrôleur général, afin que personne ne soit taxé de manière déraisonnable, et pour tempérer au besoin la pression de l'impôt, le comte (Gui de Dampierre) désigna provisoirement le bailli de Gand, le chevalier Willem van Bonem... »

(Delfos, 1952, p. 42.)

1288

« ... Pour faciliter la perception de l'accise, le comte nomme de sa propre initiative les receveurs et désigne un contrôleur général, le chevalier hospitalier Willem van Bonem de Damme, qui avait déjà été échevin du Franc de Bruges... »

(van Belle, 1988, p. 96.)

1289

« ... Les régents de Gand en 1289 n'étaient pas très satisfaits de l'action du nouveau bailli que Gui avait nommé l'année précédente comme son représentant dans le territoire de la ville de Gand. Ce bailli était un chevalier de Damme, Willem van Bonem, ancien échevin du Franc... »

(J. Gaillard, Bruges et le Franc I, Bruges 1857, p. 203)

(Delfos, 1952, p. 42)

1289

« ... Mais il semble avoir excellé non moins par son zèle (W.v.B.) et son style a dû rapidement déplaire au sens plus progressiste des XXXIX (échevins de Gand). Selon eux, il avait violé à plusieurs reprises les lois de la ville. Début 1289, ils allèrent le dénoncer devant le Parlement (Paris) avec une longue liste d'accusations, qui semblaient en effet très graves. Il avait, disaient-ils, sur le territoire de Gand, sans jugement des échevins, fait arrêter et décapiter quatre personnes, saisi les biens de bourgeois de Gand, encore une fois sans l'intervention des échevins de Gand, mis des maisons sous séquestre, etc. »

(Delfos, 1952, p. 42)

1289

« ... Nous n'avons pas besoin de supposer, sur la base de l'accusation des XXXIX, que le bailli de Gui avait outrepassé les limites de sa compétence, ni que le comte, qui le protégeait, était opposé aux droits des XXXIX et à l'autonomie de Gand. Mais ces messieurs étaient des plaideurs invétérés et envoyèrent leurs délégués et courriers à Paris. Ils en voulaient cette fois surtout à Willem van Bonem, le bailli... »

(Delfos, 1952, p. 44)

1289

« ... Les XXXIX avaient mentionné dans leur plainte devant le tribunal royal le point de litige sur la juridiction à Gand, ainsi que les menaces que Willem van Bonem, le bailli, et Zeger van Belle, le maréchal, avaient proférées contre eux. La Cour (Philippe le Bel) envoya alors un officier de la justice française, Jean Panetier, en Flandre (12 août 1289) en tant qu'observateur... Chaque fois que les bourgeois de Gand en feraient la demande, la procédure judiciaire devrait se dérouler en français... »

(Delfos, 1952, p. 48-49)

1290

« ... Il est probable que Gand obtint alors un autre bailli et que Willem van Bonem fut renvoyé... »

(Delfos, 1952, p. 50)

1291

« ... L'affaire contre Willem van Bonem, pour les menaces, et celle sur la juridiction à Gand, furent toutes deux mises en attente. Mais Willem van Bonem commit d'abord de sa propre autorité un acte audacieux, qui contribua peut-être à étouffer l'affaire. »

(Delfos, 1952, p. 51)

1291

« ... L'ENLÈVEMENT DES XXXIX : fin juin 1291, un nouveau désaccord était survenu entre les échevins et la commune sur le thème éternel des comptes et de la responsabilité. On avait introduit en 1288 un nouveau tarif pour les accises, dans le but d'apurer les dettes de la ville. Mais la dette avait depuis lors augmenté d'année en année. Les 50 000 livres de déficit de 1275 sont passées à 100 000 peu avant 1294. Les XXXIX ne rendaient pas de comptes clairs sur leur gestion et la commune demanda au comte, puisque le magistrat était en défaut, de mettre sous séquestre les biens et le sceau de la ville, pour empêcher les échevins d'endetter davantage la ville. Les Gantois n'étaient en effet pas en mesure de supporter ce fardeau insupportable. Il semble qu'alors le sceau de la ville fut effectivement retiré aux échevins et confié à l'abbé de Saint-Pierre. De cette manière, on pensait pouvoir mieux contrôler les écritures et les actes des autorités. Contre cette mesure du comte, les XXXIX n'ont apparemment pas porté plainte. Mais leur retenue dans cette affaire est peut-être seulement la conséquence de l'entreprise que le chevalier Willem van Bonem avait imaginée pour mettre les XXXIX échec et mat. »

(Delfos, 1952, p. 51)

1297

« ... Le seigneur de Bonem, qui apparaît ici parmi les Liebaards, est peut-être la même personne que l'ancien bailli, le chevalier Willem van Bonem (Pourquoi pas ? Note J. B.), que nous avons connu entre 1289 et 1292 comme un adversaire farouche des XXXIX de Gand. Ou est-il plutôt le Willem van Bonem, qui apparaît pour la première fois en 1296 comme 'chevalier et frère de Saint-Jean de Jérusalem' et en 1302 comme l'un des grands chefs de la révolte des Liebaards ? Un neveu du premier ? Ou les deux personnages sont-ils identiques ? Alors le bailli de l'année 1289, qui en 1292 emmena quelques échevins de Gand en Hollande et fut banni pour cet acte illégal par le comte Gui, aurait commencé une 'nouvelle vie' au sein de l'ordre de chevalerie spirituelle à Chypre ou en Crète, pour plus tard, réintégré dans les bonnes grâces de Gui, et participer avec lui en 1297 à la lutte contre les Royaux. Le poète brabançon du 'Spieghel Historiael' le nommera : 'un des plus intrépides qui vivent'... »

(Delfos, 1952, p. 126)

1297

« ... Robert de Béthune, par l'intermédiaire du seigneur de Bonem, entra en contact avec un groupe de jeunes patriciens partisans des Liebaards à Damme et probablement aussi avec les Liebaards à Bruges. Avec leur aide, il réussit à faire entrer par surprise une division anglo-flamande à Damme et à en chasser les Français. Peut-être un trésorier des Royaux a-t-il alors perdu dans la cohue ces 179 pièces de monnaie à l'effigie de Philippe le Bel, qui furent plus tard déterrées dans une prairie qui avait conservé le nom de 'champ de bataille'... »

(Delfos, 1952, p. 126)

1297

« ... In extremis, Robert de Béthune peut mener à bien la libération du Zwin. Car lorsqu'il apprend que la trêve entre en vigueur le 12 octobre, il marche avec une armée combinée sur Damme et conquiert cette tête de pont si importante sur Charles de Valois, pouvant compter sur le soutien du Dammois Willem van Bonem et de quelques habitants Klauwaards (11 oct.). »

(van Belle, 1985, p. 187)

1297

« ... En 1358, le château et le fief 'Bonem' sur la paroisse de Sainte-Catherine hors de Damme, passèrent également, via Heinric (Braderic), en possession d'un autre fils, Jacob Braderic. Le fief, qui fut acheté à Jacob van Heimsrode, comprenait 45 mesures de terre et un important vivier qui rapportait 55 sch. gr. par an. À la fin du XIIIe siècle, ce fief appartenait au Frère Willem van Bonem, chevalier, qui le vendit en 1297 au chevalier Bouden van Dudzele... » (M. Coornaert donne dans son ouvrage sur Dudzele le texte intégral de l'acte de vente. Nous en donnons ici un extrait. Note J. B.)

(J. Sabbe, 1975, p. 173)

1297

« ... que frère Willem van Bonem, chevalier, se présenta devant nous et devant Karstiane den Brabandere, à l'époque Bailli de Bruges, que mon Seigneur Guy, Comte de Flandre, avait placé en son lieu pour faire légalement toutes les choses qui sont décrites ci-après, et vendit à mon Seigneur Boudene van Dudzele, chevalier, tous les hommages qui appartenaient alors aux biens de Bonem, et tout le droit qui s'y rattachait, desquels hommages le frère Willem van Bonem était l'homme de notre Seigneur le comte de Flandre susdit, c'est-à-dire chaque hommage de plein relief dix livres de deniers flamands et chaque hommage de demi-relief, au prorata du plein relief, denier pour denier ; de tous lesquels deniers susdits frère Willem van Bonem se tint pour bien payé et satisfait... »

(M. Coornaert, 1985, p. 300)

1301

« ... Guillaume (de Juliers), prêtre par la grâce de Dieu et archidiacre de l'église Saint-Servais à Maastricht, y avait été approché par Jean de Namur et peut-être par Willem van Bonem pour s'engager dans la libération du comté de son grand-père Guy de Dampierre... »

(J. van Belle, 1985, p. 251)

1301

« ... Il est probable que dès 1301, lors des premiers troubles qui, 'dit-on', furent déclenchés par Pieter de Coninck, des chefs agirent en secret, comme le seigneur de Bonem, chevalier de l'Ordre des Templiers, qui, selon le témoignage du moine tournaisien Li Muisis, déclenchera l'insurrection au printemps 1302... »

(Delfos, 1931, p. 23)

1302

« ... Louis van Veltem prend manifestement plaisir à réunir les noms des principaux héros de la bataille et il les énumère succinctement trois fois de suite :

Borluut ende Godsenhove fijn,

Rinesse, Bonem, Bangelijn,

Perrant ende oec Poppenroden.

... Poprode, Bangelin, Borlu, Perrant

Dese nom'ic sonderlinge uut,

Rinisse ende Jan Borluut,

Godsenhove ende Bangelijn,

Bonem ende Poprode die sijn

Welwerd dat men de persineren

Naast Guelke ...    

(V. Fris, Gand 1902)

1302

« ... Les 17 et 18 mai, parmi les chevaliers de l'armée brugeoise qui séjournaient alors comme bannis à Damme ou dans les environs, se trouvait également Zeger de Gand avec ses 60 cavaliers. Il est probable que deux autres nobles, qui sont mentionnés ailleurs avec lui, s'y trouvaient également : un seigneur Hugesone (probablement de la famille des van Boenem) et le chevalier Willem van Bonem. Ce dernier était originaire de Damme même et aujourd'hui le nom de sa lignée et de son château perdure dans celui du quartier de Bonem. Dès 1297, il avait été l'un des chefs qui avaient organisé l'attaque de Damme et en mars ou avril 1302, il y avait de nouveau planté le drapeau des Liebaards. Nous pouvons supposer que dans cette nuit du 17 au 18 mai, il fut également l'organisateur du plan d'attaque de Bruges, le chef qui divisa les bannis en bandes de combat et régla leur marche... »

(Delfos, 1952, p. 228)

...

« ... Une fille de Willem van Bonem est l'épouse de Jan Hughesone... »

(Gaillard, Le Franc de Bruges I, p. 203)

1302

« ... Il y avait depuis des jours (à Gand) une vague agitation dans l'air, et l'on peut supposer que les anciens adversaires des XXXIX, les patriciens du côté des Liebaards, et surtout les membres du magistrat qui avaient été démis en juin 1301, attisaient déjà le feu et étaient en contact avec les Brugeois et Willem van Bonem... »

(Delfos, 1952, p. 213)

1302

« ... Le premier représentant de la direction des Liebaards qui apparut alors à Bruges pour assister le magistrat en paroles et en actes fut le 'chevalier hospitalier' Willem van Bonem. Selon un dessin de Li Muisis (un moine tournaisien de l'époque. Note J.B.), c'est lui qui donna le signal de l'insurrection à Bruges. Il était vraisemblablement l'un des officiers de liaison qui, depuis décembre 1301, maintenaient secrètement les contacts nécessaires entre les groupements Liebaards en Flandre et le quartier général actif à l'étranger... »

(Delfos, 1952, p. 212)

1302

Pratiquement toutes les mêmes données se retrouvent chez le Dr. J. F. Verbruggen, De Slag der Gulden Sporen, Anvers 1952, aux pages 147, 148, 199n, 233, 193, 198 et 308.

1302

« ... Willem van Bonem, le chevalier du Temple, était depuis 1291 l'un des principaux confidents du comte Gui. C'est lui qui fut chargé par le prince flamand de livrer quelques-uns des trente-neuf Gantois récalcitrants, arrêtés par Gui, à Florent V, comte de Zélande, pour les enfermer dans les geôles zélandaises. Il fut pour cette raison réclamé par Philippe le Bel, le protecteur des Leliaards gantois ; mais il parvint à échapper à cette extradition. Dès le premier jour de l'insurrection, il prit le parti du 'commun' de Bruges. À peine Guillaume de Juliers était-il arrivé à Bruges début mai, qu'il alla piller avec les artisans le château de Male, où les patriciens avaient caché leurs trésors, et à ses côtés nous voyons, outre le tisserand Pieter de Coninck et le boucher Jan Breidel, également Willem van Bonem. Le rôle important qu'il a joué pendant la bataille nous est confirmé par L. van Velthem : Il lutta, dit le poète, avec la plus grande violence, et plus d'un Français tomba sous ses coups. Capitaine du Zwin avec Zeger de Gand au mois d'août, nous le trouvons en septembre 1302 avec Popperode, Bangelijk, Borluut et Godsenhove à la Nieuwendijk, aux frontières de l'Artois, où il commandait peut-être trois bandes de Templiers, gris, blancs et noirs, dont les comptes font mention... »

(V. Fris, 1902, p. 303-04)

1302

« ... Le plus célèbre des chevaliers du Temple de Bruges est sans aucun doute Willem van Bonem ; un confident du comte Gui. C'est lui qui livra les 'Leliaards' gantois récalcitrants, arrêtés par le comte, à Florent V de Zélande pour les enfermer dans les geôles zélandaises. Willem fut pour cela réclamé par Philippe le Bel, mais il parvint à échapper à l'extradition. La bataille de 1302 trouva Willem aux premiers rangs. Le chroniqueur Gilles le Muisit raconte que l'insurrection des Brugeois, qui donna lieu au pillage du château de Male, fut provoquée à l'instigation d'un certain chevalier de l'ordre des Templiers, du nom de Bonem. Il ressort enfin du récit circonstancié, et considéré comme fiable par les historiens, que Louis van Velthem (Spieghel Historiael, 1316) a écrit sur la Bataille des Éperons d'Or, que ledit chevalier du Temple, dont le nom est donné comme Willem van Bonem, a joué un rôle de premier plan en tant que chef des Brugeois dans la bataille de Groeninge... ». « ... C'est sur la base de telles données historiques que l'on peut saluer, avec plus de certitude que ce n'est le cas pour Jan Breidel (dont la participation réelle à la bataille de Courtrai n'est en fait mentionnée nulle part), en la personne du courageux Templier Willem van Bonem, un héros brugeois de 1302 jusqu'ici non célébré à sa juste valeur... »

(J. Claeys, 1937, p. 265-266)

11 juillet 1302

« ... Debout ! Flamands ! J'ai appris

Que divers ennemis viennent sur nous ! Borluut et Godsenhove bien,

Renesse, Bonem, Bangelijn,

Ferrant et aussi Poppenroden, Ceux-ci les ont de nouveau rattrapés,... »

(Spieghel Historiael)

11 juillet 1302

« ... Guillaume de Boonem, chevalier de l’Ordre de l'Hôpital, qui avait pris part avec Breydel à l'escalade du château de Male, y commande des écuyers que l’on désigne sous le nom de chevaliers du Cygne. Trois troupes de Templiers : les noirs, les blancs et les gris se trouvent aussi parmi les combattants et au milieu d'eux le moine Guillaume de Saeftingen, ancien vassal du sire de Renesse... »

(P. Breydel, VT/4, p. 41).

11 juillet 1302

« ... Avec le seigneur de Bonem, une troupe de Templiers est arrivée, tous vêtus d'un manteau blanc à croix rouge, leurs écuyers d'un manteau noir. (Comptes de la ville de Bruges, 190)... »

(Delfos, 1931, p. 47)

11 juillet 1302

« ... Les Templiers étaient commandés par Willem van Bornhem (!! Nous n'avons pas osé modifier l'orthographe ici. Note J.B.) et son frère Baudouin, deux descendants de la Maison de Flandre. Rompant avec les règles du combat courtois, ces hommes achevaient leurs adversaires comme s'il s'agissait de Sarrasins, sans épargner leur vie ni faire de prisonniers. Un certain Willem van Saeftinge, frère lai chez les Trappistes (sic!!!) de ter Doest, se vanta même d'avoir abattu et achevé de sa propre main quarante chevaliers, sans compter quatorze autres qui étaient tombés de leur cheval et auxquels il avait coupé la tête... Dans ce dernier groupe se trouvait le comte d'Artois en personne. Il fut plus tard excommunié pour ces faits et d'autres péripéties et condamné à aller renforcer outre-mer ses amis Templiers dans l'Ordre de l'Hôpital. Et comme il n'avait toujours rien compris, il devint mahométan... »

(Saint-Hilaire, 1975, p. 78)

11 juillet 1302

« La brèche ! La brèche avait été comblée par des hommes de toutes les divisions. Yprois (oui, 'on y vit Saint Georges lui-même combattre'...), Poprode, Bangelijn d'Aardenburg, Bonem, Borluut : chaque contrée pouvait nommer un héros... »

(Delfos, 1952, p. 264)

11 juillet 1302

« ... C'était le moment le plus critique, et sans le sang-froid et la rapidité de décision de Renesse, sans la ténacité des troupes de réserve rassemblées (les Zélandais et un corps de Poprode), sans la fermeté de Gui et l'audace avec laquelle même des groupes de l'aile gauche furent appelés en renfort (Borluut et Bonem), la bataille aurait peut-être été perdue pour les Liebaards... »

(Delfos, 1952, p. 258)

Juillet 1302

« ... De jour en jour, de nouvelles bandes arrivaient à Courtrai ou au camp de la Lys : nobles, paysans et bourgeois. Avec la 'chevalerie de Flandre occidentale', le chevalier Geraard de Dunkerque, avec le fils du seigneur d'Audenarde capturé, des hommes de la ville et de la châtellenie, Bouden Poprode avec des contingents du Pays de Waes, Willem van Bonem avec des nobles et des paysans des Quatre-Métiers... »

(Delfos, 1952, p. 213)

1302

« ... La guerre continua. Zeger de Gand et Willem van Bonem naviguèrent le long du Zwin avec une petite flotte à la rencontre de quelques navires français qui voulaient débarquer des troupes ici... »

(Delfos, 1952, p. 270)

13 Octobre 1307

« ... À l'aube, pratiquement tous les Templiers de France sont arrêtés et emprisonnés. (Ce 13 était un vendredi. Vous n'êtes pas superstitieux, j'espère ?)... »

(Belgica, p. 75)

1308

« ... La haine de Philippe le Bel envers les Templiers date de la bataille de 1302. Il ne pardonna pas à l'ordre d'avoir armé nos milices communales du terrible GOEDENDAG, cette arme d'origine turque, que les Templiers eux-mêmes avaient découverte à leurs dépens en Orient. Ce sont surtout les jambes des chevaux qui en pâtissaient... »

(Belgica, p. 4)

1314

« ... Le 18 mars 1314, Jacques de Molay (Grand-Maître de l'Ordre des Templiers en France) et son adjoint Geoffroy de Charnay sont exécutés sur le bûcher sur l'île aux Juifs à Paris (aujourd'hui Place du Vert-Galant)... »

(Belgica, p. 59)

Généralités :

Le Prof. dr. Lieven K. Cumps, dans son ouvrage DE TEMPELIERS IN VLAANDEREN, p. 116, note 287, affirme que seulement une vingtaine de Templiers flamands sont connus. Il désigne les plus importants par une petite croix. Selon lui, Willem van Bonem n'est cependant pas assez important pour recevoir une croix d'honneur.

Nous la lui accordons ici !

Conclusion :

Peut-être aucune. En effet, Willem van Bonem, templier, capitaine du Zwin, négociateur, organisateur des Mâtines brugeoises, n'a pas reçu de croix d'honneur. Peut-être pourrait-on encore lui donner le nom d'une rue à Damme. Une plaque commémorative...

Quelques questions se posent cependant, auxquelles nous n'avons pas pu répondre dans notre livre pour la jeunesse (qui aura probablement pour titre « Pour protéger le pays »), sur le héros de notre région.

Certains doutent qu'il ait été Templier. Les Templiers n'étaient-ils pas des pères ? Des moines ? Ou non ? Ne prononçaient-ils pas les trois vœux : chasteté, obéissance, pauvreté... ?

Nous savons de manière pertinente que Willem van Bonem était marié. Nous savons de manière pertinente qu'il possédait des biens propres (et les a vendus).

Or, il se trouve qu'à cette époque, on ne prenait pas toujours très au sérieux les soi-disant vœux évangéliques. Nous savons avec certitude que les Templiers possédaient des biens propres. Pieter Uutenzacke, le Grand-Maître des Templiers de Bruges, a payé de sa propre poche une grande partie des frais pour équiper les milices brugeoises en 1302. Willem van Bonem a-t-il vendu pour cela certains de ses biens en 1297 ? Peut-être en avait-il d'autres dans les Quatre-Métiers, car dans la bataille, il commande justement les affranchis de cette région.

D'ailleurs, il y avait trois sortes de Templiers : les blancs (les vrais ?), les noirs (leurs serviteurs au combat) et les gris. Ce que ces gris étaient, nous ne l'avons pas encore découvert. Peut-être s'agissait-il justement de Templiers qui vivaient en dehors des commanderies.

De Uutenzacke, nous savons entre autres qu'il avait une maison dans le Westmeers. Il y avait aussi des sœurs qui appartenaient à l'ordre des Templiers. Elles ne pouvaient cependant pas résider sous le même toit que les frères. Pas étonnant qu'un tel ordre s'éteigne !

Où sont-ils donc passés ?

Blague à part. Les Templiers ne se sont pas éteints. Philippe le Bel était si furieux (voir Belgica, p. 4 et 75) qu'il fit arrêter tous (tous ?) les Templiers en France le vendredi 13 octobre 1307. Pas en Flandre. Il n'y avait plus grand-chose à dire à ce moment-là.

René De Keyser écrit dans son article cité que Willem van Bonem est mentionné pour la dernière fois dans l'histoire le 10 janvier 1312. Compréhensible ! Mais nous entrons maintenant dans les mythes, les légendes et les suppositions. La plupart des Templiers et leurs biens furent intégrés à l'ordre des Hospitaliers, mais (selon certains mythes francs-maçons anglais) les Templiers flamands émigrèrent en Écosse où leurs francs-maçons (seraient-ce ces Templiers Gris ?) fondèrent les premières loges.

Philippe le Bel, avec l'aide du pape Clément V, fit condamner les Templiers pour idolâtrie, sodomie, homosexualité et bien d'autres péchés qui florissaient alors dans... les palais royaux et pontificaux. Jacques de Molay les maudit tous les deux sur le bûcher. Ils moururent dans l'année dans d'atroces souffrances.

Mais les francs-maçons de 1986 n'ont pas encore oublié Jacques de Molay. En Amérique, un mouvement de jeunesse franc-maçon porte son nom. Et dans le rituel du 33e (et plus haut) degré de la franc-maçonnerie, on demande : « Connaissez-vous les deux abominables ? » Réponse : « Oui, Bertrand de Got (nom séculier de Clément V) et Philippe le Bel ». Ils sont représentés par deux têtes de mort. L'une avec la couronne royale ; l'autre avec la tiare.

Nous... n'oublierons tout de même pas Willem van Bonem


Sources

Paul Breydel, Bruges et les Breydel, Brussel 1974.

J. Claeys, Het Tempelhof te Brugge, Biekorf 1937.

Lic. M. Coornaert, Dudzele en Sint-Lenaart, Dudzele 1985.

DR. L. Cumps, De Tempeliers in Vlaanderen, Tielt 1976.

L. Delfos, 1302 door tijdgenoten verteld, Antwerpen 1931 L. Delfos, Het avondtuur van de Liebaards, Tielt 1952.

Paul de Saint-Hilaire, Raadselachtig Vlaanderen, Brussel 1975.

R. Dupuy, La Foi d'un Franc-Maçon, Paris 1975.

V. Pris, De slag bij Kortrijk, Gent 1902.

J. Sabbe, Heintic Braderic, een 'homo novus' uit de 14de eeuw, in' 'Album Albert Schouteet', Brugge 1975.

J. van Belle, Een andere Leeuw van Vlaanderen, Tielt 1985.

Dr. J.P. Verbruggen, De Slag der Gulden Sporen, Antwerpen 1952.

X. Le Mystère belge des Templiers, in Belgica 2000, oct. 1984.


LEGENDES Promenades aux environs de Houffalize

 




PROMENADES AUX ENVIRONS DE HOUFFALIZE


Félix Ouverleaux Lagasse

Extrait du Guide Nels
"Promenade aux environs de Houffalize" (A.Dubois)
Bruxelles 1903



GENA ET MAGONETTE

Comment imaginer, au spectacle de ce village charmant, qu'il ait pu être jadis un repère de brigands ?
C'est là, que naquit en 1790 Magonette qui allait devenir un des plus célèbre bandit d'Ardenne. Dés sa jeunesse, Magonette s'adonna à la rapine. Bientôt, il devint le chef d'une petite bande de malandrins. Plusieurs fois condamné pour vol, dont la première fois pour vol de mouchoirs (foulards) et "pris" à La Roche, il est mis en prison où il fit la connaissance   d'un bandit du même acabit : Géna. Les deux comparses s'évadèrent et reprirent la tradition de Noyé le Poyou. Le groupe hanta la région de Wibrin-Nadrin et Les Tailles, multipliant les agressions, vols pour se procurer argent, nourriture et vêtements notamment chez le curé de Les Tailles et un riche fermier de Fontenaille. Suite au crime du gendarme Poncin, la gendarmerie s'organise pour aboutir à leur arrestation. Toutefois leurs recherches restent sans résultat. La population de Wibrin, dans la majorité était compromise dans ses activités, la peur des bandits transformant le paysan en indicateur, protecteur ou receleur.
Géna et Magonette furent capturés en 1820 par des forgerons, du côté d'Aywaille, lors d'une de leurs "excursions" à Liège, où ils allaient dépenser l'argent volé. Expédiés en prison, ils seront jugés et guillotinés à Liège le 4 juin 1821.
Ce furent, en Belgique, les deux derniers condamnés à mort à avoir la tête tranchée.
Lors d'une séance au tribunal Magonette s'est écrié : "Belhez, Belhez où j'ai tant laissé".
Belhez est un lieu-dit situé dans les bois entre Les Tailles et Wibrin.
Parlait-il d'un trésor ?
Les deux malfaiteurs entrèrent dans la légende.


LES LURCETTES

Lors de leurs vacances à Wibrin, les novices des récollets de Liège se moquaient volontiers de la naïveté des indigènes et surtout de leur curé. Lassé, celui-ci décide de donner une leçon à ces prétentieux moinillons. Il met en doute leur patience et leur habileté, et leur propose la "Chasse à la Lurcette". Picqués au vif, les novices relèvent le défi et vont passer la nuit blanche, un sac à la main à l'affût derrière les buissons pour attendre le passage de cet animal imaginaire.
A malin, malin et demi.


LA POSSEDEE DE WIBRIN

Un acte de décès très étrange transcrit en 1739 à la paroisse de Wibrin et signé par les curés et vicaires d'Ollomont, Wibrin et Tailles fait état de la mort le 19 juillet 1739 d'une habitante de Wibrin possédée de 36 démons, qui d'après l'aveu de ces derniers, entrèrent dans cette malheureuse âgée seulement de deux ans par le moyen d'une sorcière qui offrit à cet enfant une pomme qu'elle reçut sans faire le signe de croix. Les démons ne manifestèrent leurs présences que lorsque l'intéressée fut âgée de 24 ans et immédiatement après son mariage.
L'acte signale que, le jour de sa mort, avant de livrer le dernier combat avec le démon, elle s'était confessée et avait communié avec la dévotion la plus édifiante. Elle fut ainsi délivrée et du démon et de la vie après plusieurs heures d'atroces et spectaculaires souffrances dues tant à sa maladie qu'aux épreuves qu'on lui fit subir.


LES MACRALLES DE WIBRIN

Jusqu'au début du XIXè siècle, les habitants de Wibrin étaient surnommés les "makrals", les "makrins" ou les "macrês".

J-Th De Raadt, dans "Les sobriquets des communes belges" explique :
"D'après la légende, un jour, les chiens des chasseurs étrangers à la commune y avaient croqué des poules. Les gens du pays jetèrent un sort sur eux, après quoi ces chiens pondirent des oeufs".

Dans une étude signée Gaston Gérard, l'anecdote suivante à été trouvée :
Qui n'a entendu parler des macralles de Wibrin et des méfaits que l'on attribue généralement à ces mâlès djins (mauvaises gens). Je veux, pour en témoigner, que l'amusante historiette qui suit. Elle m'avait été racontée par le curé de la région : deux charretiers de La Roche, qui conduisaient à Houffalize leurs attelages lourdement chargés, venaient d'arriver à Wibrin. L'un d'eux voulait s'y arrêter pour permettre aux chevaux de se reposer un peu, mais l'autre s'y opposait. "Ne sais-tu pas, dit-il à son compagnon, que Wibrin est un village de macralles ?"
"Ce sont des bêtises. Il n'y a plus de macralles, même à Wibrin", répondit l'autre.
Mais à ce moment, une vieille femme qui, du pas de sa porte toute proche, avait entendu la discussion, l'interrompit en disant : "Siya, siya, m'fi, ign'a co des macralles à Wibrin. Dj'estans co nos sèt'" (Si, si mon fils, il y a encore des sorcières à Wibrin. Nous sommes encore sept).


LA CHAPELLE

La légende veut que cette chapelle ait été construite en 1680 par deux frères nés à Mont du nom de Lomal. Ces jeunes gens se firent marins et servaient en 1680 sur un vaisseau commandé par un lieutenant de Jean Bart. Ce vaisseau fut surpris par les anglais et après un combat acharné - l'équipage n'ayant pas voulu se rendre - le navire fut coulé; les deux frères parvinrent à se réfugier sur une épave. Ils invoquèrent la Vierge Marie et firent le voeu de lui élever une chapelle dans leur paroisse natale s'ils échappaient au danger de la mer. Ils réussirent à regagner sains et saufs la terre ferme et s'acquittèrent fidèlement de leur promesse.


LA VACHE DE TOUSSAINT CORNET

Un soir, le vacher du village qui avait rassemblé son troupeau veut attirer avec son cheptel la vache blanche inconnue qui avait durant la journée tenté d'éloigner ses bêtes de cette vallée herbeuse en se joignant au troupeau.
Il conçut de s'en emparer pour la ramener à Wibrin.
Il l'enchaîna, mais la bête se mit à galoper et entraîna Toussaint jusqu'à un détour de Martin Moulin et tout à coup, le long du ruisseau, la vache lui échappa.
Plus exactement, elle fit place à une belle et jeune créature qui lui dit :
"Brave homme, si tu reviens demain avec le plus grand sac que tu puisses trouver, je te récompenserai pour les bons soins que tu as eus pour ma vache. Mais entraîne ton troupeau ailleurs, les fées, mes soeurs se désolent de voir leurs fleurs foulées aux pieds".
Le lendemain, il revint avec sa paillasse vidée et la déposa devant la grotte, lorsqu'il revint à quatre heures, il la trouva bourrée à craquer.
La jeune fille lui dit :
"Voici la récompense promise, mais si tu ouvres ce sac avant d'être chez toi, tu perdras tout"
Comme le sac rendait un son de gros sous, Toussaint ne résista pas et l'ouvrit.
A l'instant même, le sac devint plat comme une galette et un peu de poudre d'or lui coula sur les mains.
Toussaint médita : "La curiosité est un vilain défaut".
Mais depuis ce jour, la vallée fleurie reste toujours le domaine des fées.


LA VALLEE DES FEES

Vous avez tous entendu parler des fées, des lutins, feux follets et nutons. Ces esprits charmants autrefois peuplaient toute la terre. Ils ont fui devant le progrès, et surtout ont abandonné les villes dont l'atmosphère ne leur convient pas. Aussi des savants vous affirmeront-ils avec supériorité que ces esprits n'existent pas. Cela tout simplement, parce qu'ils n'en ont jamais vu. Belle raison en vérité !
Demandez aux habitants des montagnes de l'Ardenne, s'ils connaissent les fées. C'est en effet, loin des palais, dans les vallons agrestes, aux abords des ruisseaux murmurants que s'est réfugié le gentil monde des esprits. Les grands de la terre ne les intéressent pas, ils aiment les humbles. Chaque chaumière dans le pays a son lutin bienfaisant. C'est lui, qui le jour de marché, au bourg voisin, éveille en temps la fermière. C'est lui qui suspend la truite à l'hameçon du pêcheur. C'est lui encore qui ramène vers l'étable, la vache égarée dans la forêt.
Ce sont les fées qui penchées sur le berceau des nouveaux nés, leurs donnent les qualités qui en feront de braves ménagères et de bons et honnêtes pères de famille. Les méchants ne naissent que là où il n'y a plus de fées.
La ravissante vallée à laquelle on a donné le joli nom de "Vallée des fées" est un des séjours de prédilection de ces esprits bienfaisants. Allez-y le soir ou au lever du soleil, vous aurez la chance d'en rencontrer.
C'est ainsi qu'un matin de mai, dès avant l'aurore, le jeune Antoine Michel, du hameau d'Achouffe errait dans le vallon dans l'espoir d'y surprendre une de ces aimables fées dont les histoires avaient bercé son enfance.
Il était parvenu, au moment où naissait le jour, à peu de distance du moulin de Ziette, là où vers l'amont, la vallée étroite semble fermée par la montagne aux roches abruptes couvertes de mousses et de fougères, entremêlées de grands chênes étendant sur le ciel leurs rameaux noueux et où le ruisseau sinueux s'en va cascadant, bouillonnant, à travers la prairie remplissant l'air d'une joyeuse et fraîche musique.
Soudain, au milieu de la blanche et légère buée matinale, s'élevant lentement de l'herbe humide, voici qu'Antoine aperçoit un ravissant spectacle.
Des ombres légères s'agitent, de petits pieds remuent en cadence, et l'air se remplit bientôt de cris et de chants joyeux.
Ce sont les fées de la vallée réunies en un gracieux ensemble qui célèbrent le retour et la fête du printemps.
Elles dansent et sous leurs pas, dans le pré, naissent les fleurs. Bientôt, l'herbe est émaillée de leurs belles couleurs et mille senteurs délicieuses embaument l'atmosphère.
De leur souffle léger et parfumé, les gentilles fées, répandent sur le corps des libellules et sur les ailes des blancs papillons, de fines poudres d'or, de sinople, de grenat et d'azur. Les jolis insectes volent de fleurs en fleurs, autour des groupes de danseuses, et miroitent au soleil comme de riches joyaux, plus beaux, plus brillants qu'il n'en peut sortir des mains des plus habiles orfèvres.
C'est la fête du printemps !
Et la buée continue doucement à s'élever entraînant avec elle le joyeux cortège des fées. En frôlant les flancs des collines, leurs doigts sèment l'or aux branches des genêts, couvrent d'un frais manteau de vert tendre les sombres branches des sapins et font craquer les bourgeons des grands arbres. Dans l'air tiède et doux chantent les oiseaux ravis de ce changement magique. Leurs trilles éperdus remplissent les airs. La nature entière tressaille.
Lentement le soleil monte à l'horizon inondant de gaie lumière ce joyeux spectacle.
C'est la fête du printemps !